De la conclusion d’un partenariat dans un projet usuraire

Sheikh Mohammad Ali Ferkous

Question: Je suis un jeune chômeur diplômé de l’université, en quête de travail depuis la fin de mes études. On m’a proposé un projet de partenariat avec mon oncle dans une unité d’équipement agricole. J’ai signé le contrat sans chercher à savoir la procédure du travail. J’ai fait tout cela par complaisance à mes parents. Par la suite, j’ai constaté qu’un matériel estimé à 400 millions de centimes m’a été fourni par l’entreprise SALEM. La contribution de l’État est d’ordre de 50 % (c’est-à-dire 200 millions de centimes) qu’il verse directement à l’entreprise SALEM sans un intérêt usuraire. Les 200 millions qui restent seront versés par la même entreprise qui stipule un intérêt usuraire de 8 %, c’est-à-dire 16 millions de centimes. Je serai ainsi redevable de 216 millions à l’entreprise SALEM payés pendant 5 ans. Cette pratique est-elle une pratique usuraire ? Si c’est le cas, sachez que je n’ai pas encore bénéficié de ce projet, quoiqu’il soit arrivé à sa dernière phase 8 mois après le dépôt du dossier sous mon nom. Si la procédure est finalisée et j’ai bien reçu l’équipement, suis-je obligé de m’en débarrasser, ou devrais-je concéder le droit de propriété à mon oncle et à ma famille afin de ne pas avoir des problèmes avec eux et éviter les frictions ? Qu’Allâh vous bénisse et élargie votre savoir.

Réponse : Louange à Allâh, Maître des Mondes ; et paix et salut sur celui qu’Allâh a envoyé comme miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Cela dit : Sache que le projet que tu viens d’entamer a sans doute un caractère usuraire, car le contrat stipule un intérêt ; la règle dit alors : Tout contrat qui génère un bénéfice est une usure.

Faire preuve de négligence quant au fait de savoir la nature du contrat avant de le signer n’exonère pas de la responsabilité et du péché qui pourrait en résulter. Le prétexte d’ignorance se voit rejeté tant que des savants peuvent élucider le jugement religieux. Le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم a dit : « Tant qu’ils ne savent pas, pourquoi n’ont-ils pas questionné ? La question est le remède de l’ignorance. »(1)

Cela est clairement défini dans la parole d’Allâh :
﴿فَسۡ‍َٔلُوٓاْ أَهۡلَ ٱلذِّكۡرِ إِن كُنتُمۡ لَا تَعۡلَمُونَ﴾ [النحل: 43؛ الأنبياء: 7]

Sens du verset :
﴾Demandez donc aux érudits du Livre, si vous ne savez pas﴿ [s. An-Nahl (les Abeilles) : v. 7].

À la lumière de ces textes, on a institué la règle : Dans un pays musulman, objecter l’ignorance du jugement religieux est inacceptable.
À la base, toute transaction usuraire est annulée, car le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم a dit : « Quiconque accomplit une œuvre que nous n’avons pas ordonnée est rejetée. »(2) Les deux contractants doivent renouer avec leur situation préalable. Mais, s’ils avaient entamé les premiers pas dans l’accomplissement du contrat et le créditeur refuse de l’annuler [ou de le résilier] – en raison du délai expiré ou autres –, cette personne peut [honorer ses engagements dans ce contrat].

Pour se conformer aux lois séculières en vigueur dans ce genre de situations et vu l’absence d’une autorité religieuse légitime, et quoi qu’il en soit le débiteur se voit obligé de verser les intérêts usuraires ; et face à l’absence d’un moyen qui peut annuler le contrat, l’autorité temporelle oblige ce débiteur à respecter le contrat usuraire sans avoir un autre choix, sinon toutes les incidences et les sanctions pécuniaires s’appliqueront en cas de refus de se conformer à l’application des clauses inscrites dans le contrat.

Sachant, d’un autre côté, qu’il est illicite d’endommager les équipements, ce qui serait un gaspillage interdit par la religion. La nécessité, et non la religion, oblige désormais à lui valider le contrat en permettant l’application de ses clauses. Si cet homme est capable de verser le prix du prêt sans intérêt usuraire, cela serait meilleur, et s’il s’avère impossible d’échapper aux incidences financières du contrat que par le versement des intérêts, la nécessité l’oblige à le faire sans pour autant en être apaisé, transgressif ou abusif. Sa situation ressemble à celui qui paye les impôts et les taxes imposées injustement et avec malveillance. Il sera ainsi contraint de les payer.

En tout état de cause, cet homme doit se repentir de sa première action qui a conduit à une telle pratique illicite en cessant de contracter d’autres prêts usuraires. L’obéissance aux parents doit se faire dans le convenable et non le péché. Il doit multiplier les demandes de pardon et l’accomplissement des œuvres pieuses, car ﴿إِنَّ ٱلۡحَسَنَٰتِ يُذۡهِبۡنَ ٱلسَّيِّ‍َٔاتِ﴾ [هود: 114]

Sens du verset :
﴾Les bonnes œuvres dissipent les mauvaises﴿ [s. Hoûd : v. 114](3)

Le savoir parfait appartient à Allâh, et notre dernière invocation est qu’Allâh, Seigneur des Mondes, soit loué et que prière et salut soient sur notre Prophète, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.

Source : Ferkous.com

(1) Rapporté par Aboû Dâwoûd (336), d’après Djâbir ibn ‘Abd Allâh رضي الله عنهما ; jugé haşane (bon) par Al-Albânî dans Tamâm Al-Minna (131) et dans Sahîh Sounane Abî Dâwoûd (336).
(2) Rapporté par Mouslim (1718), d’après ‘Â’icha رضي الله عنها.
(3) Cf. : La fatwa n°235, intitulée : « De celui qui se repent après avoir contracté un prêt usuraire qu’il n’a pas pu le rembourser entièrement», sur le site officiel.

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