Sheikh Mohammad Ali Ferkous
La question : Il est répandu chez certains commerçants, la vente des produits de beauté, tels que le maquillage et les parfums pour femmes. Ces commerçants allèguent qu’ils conseillent les clientes de ne pas utiliser ces produits en dehors de leurs maisons. Est-ce que ce commerce est permis ?
La réponse : Louange à Allah, Maître des Mondes; et paix et salut sur celui qu’Allah a envoyé comme miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Ceci dit :
Il est interdit de vendre les maquillages dont la composition industrielle est faite à base de fœtus humains, des résidus d’accouchement ou des détritus organiques des fœtus tels que le cordon ombilical, le placenta et autres; vu que ceci est une violation de l’espèce humaine qui est interdite par les textes authentiques de la Charia.
Il est également interdit de vendre les maquillages dont la composition industrielle est faite à base de fœtus animal, comme le porc et les bêtes mortes, étant donné leur impureté. De même, il est interdit de vendre les parfums contenant de l’alcool enivrant; puisqu’il est connu qu’il n’est pas valable de vendre ce dont il est interdit de profiter tels que le vin, le porc, la bête morte et autre ; le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم dit : « Allah et Son Messager ont interdit de vendre le vin, le porc, la bête morte et les idoles » puis il dit : « Qu’Allah combatte les Juifs, car quand Il leur a interdit ses graisses (celles de la bête morte), ils les ont transformées en huile, vendu le liquide et mangé son revenu »(1). En outre, les ulémas sont unanimes pour l’interdiction de profiter des graisses de la bête morte, du porc et des graisses impures qu’utilise l’humain dans sa nourriture et pour s’oindre le corps. Ces maquillages et ces parfums sont alors interdits comme le sont : le fait de manger la bête morte et le fait de s’oindre par des substances impures; Allah عزّ وجلّ dit :
﴿قُل لاَّ أَجِدُ فِي مَا أُوْحِيَ إِلَيَّ مُحَرَّماً عَلَى طَاعِمٍ يَطْعَمُهُ إِلاَّ أَن يَكُونَ مَيْتَةً أَوْ دَماً مَّسْفُوحاً أَوْ لَحْمَ خِنزِيرٍ فَإِنَّهُ رِجْسٌ﴾ [الأنعام: 145].
Traduction du sens du verset :
﴾Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc – car c’est une souillure -﴿ [El-An`âm (Les Bestiaux) : 145].
Il est aussi interdit de vendre les maquillages qui nuisent au visage en lui provoquant des difformités ou des taches noires, ou provoquent de différentes maladies dermiques dans tout le corps, étant donné que leurs éléments composants sont faits à base de produits chimiques qui nuisent à la peau ou aux yeux; et certes, la nuisance doit être écartée de l’utilisateur lui-même et de la personne à qui on vend le produit; le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم dit : « Pas de nuisance, ni à soi-même ni à autrui »(2).
Du reste, si ces produits de beauté ne contiennent pas des substances illicites, impures ou nuisibles, il serait, en principe, permis à la femme de les utiliser tant qu’elle n’exhibe sa beauté qu’aux personnes devant lesquelles Allah عزّ وجلّ lui a permis de le faire. Aussi, il lui est permis, pour le même dessein, de se parfumer par le parfum qu’elle désire tant qu’il ne contient pas d’alcool enivrant -comme cela est déjà cité-.
Néanmoins, il lui est absolument interdit de se parfumer lorsqu’elle est en état de sacralisation pour faire le Hadj (pèlerinage) ou la `Omra; le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم dit à propos de celui qui est en état de sacralisation : «… et ne portez pas de vêtement parfumé par le safran ou El-Wers(3) »(4), et ceci concerne les femmes tout comme les hommes. De même qu’il lui est interdit de se parfumer lorsqu’elle est en deuil, le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم dit : « Il est interdit à une femme qui croit en Allah et au Jour Dernier de faire plus de trois jours de deuil à un mort, sauf le deuil qu’elle fait à son mari, car pour celui-ci elle reste quatre mois et dix jours »(5), et il dit également : « Celle d’entre vous qui veut prier à la mosquée, qu’elle ne se parfume pas »(7), vu que la femme est commandée de se parer et de se parfumer dans sa maison et pour son mari et non pas lorsqu’elle sort de sa maison, abstraction faite de sa destination.
Et évidemment, il est interdit de vendre les produits de beauté si le vendeur sait que la femme les utilisera pour se dévoiler et étaler ses charmes en sortant de sa maison, car ceci serait une entraide dans le péché et la transgression; le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم dit : « Je ne laisserai pas après moi une tentation plus nuisible aux hommes que celle des femmes »(8), et il dit aussi : « … alors, évitez (d’être séduits par) la vie d’ici-bas, et évitez (d’être séduits par) les femmes; car la première tentation des fils d’Israël était celle des femmes »(9).
Quant à celui qui sait que la femme utilisera ces produits pour étaler sa beauté dans ce qui est permis; dans ce cas il n’y aura aucune gêne de les vendre. Cependant, dans le cas où le vendeur ne connaît pas l’état de l’acheteur, le jugement de permission dépendra alors de l’usage des gens du pays et l’aspect répandu quant à l’utilisation de ces produits de beauté. Donc, si la majorité des femmes du pays les utilisent dans ce qui est permis, il n’y aura alors aucun empêchement de les vendre. Mais si elles les utilisent pour semer la tentation et les actes de dépravation, il ne sera pas permis de les vendre, étant donné que : « Le jugement se rapporte à la majorité, et le cas rare n’a pas de jugement » et que « La majorité prend le statut du tout ». El-Qarâfi –رحمه الله- a dit : « En principe, c’est la majorité qui est considérée et a la priorité sur ce qui est rare. Et c’est ainsi dans toute la Charia, car le cas majoritaire est prioritaire dans le jugement concernant la pureté de l’eau et les contrats des musulmans; comme on n’accepte pas le témoignage des ennemis et des rivaux, car généralement ils ne sont pas loyaux (dans leur témoignage). En effet, ceci est abondamment cité dans la Charia »(10). En l’occurrence, le vendeur devrait changer son activité commerciale pour une autre activité où il pourrait mieux préserver sa foi et son honneur.
Dans le cas où le dévoilement et l’étalage des charmes de la femme ne sont pas répandus (dans son pays), et le vendeur ne connaît pas [l’état de l’acheteur], il lui est alors permis de vendre ces produits de beauté par considération pour la piété et la bonté morale des gens. Néanmoins, si le vendeur doute de l’état apparent de l’acheteur, il doit alors s’abstenir de lui vendre, conformément à ce qu’a dit le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم: « Laisse ce qui t’inspire du doute pour ce qui ne t’inspire pas de doute »(11) ainsi que le hadith : « Celui qui se garde des choses douteuses, préserve sa religion et son honneur; et celui qui y tombe, tombe dans ce qui est illicite »(12).
Cela dit, il n’est pas valable de vendre ces produits de beauté et ces parfums qui sont licites pour ceux qui les utilisent dans la désobéissance d’Allah عزّ وجلّ et dans ce qu’Il a interdit, même en conseillant l’acheteur de ne pas les utiliser dans la dépravation et l’immoralité, car en principe on doit considérer l’état de la personne [à qui on vend le produit] jusqu’à preuve du contraire. Encore, il est évident que le conseil peut être accepté comme il peut ne pas l’être; et la transaction commerciale valable ne peut être accomplie qu’après que l’acheteur prouve le contraire de son état en acceptant le conseil et en le mettant en pratique.
Le savoir parfait appartient à Allahعزّ وجلّ, et notre dernière invocation est qu’Allah, Seigneur des Mondes, soit Loué et que prière et salut soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.
Alger le 11 Djoumâda Eth-Thânia 1430 H
Correspondant au 4 juin 2009 G
Source : Ferkous.com
([1]) Rapporté par El-Bouokhâri, chapitre des « Ventes », concernant la vente de la bête morte et des idoles (1/529) et par Mouslim, chapitre du « Bail à complant », (2/742) (hadith 1581), par l’intermédiaire de Djâbir Ibn `Abd Allah رضي الله عنهما.
([2]) Rapporté par Ibn Mâdjah, chapitre des « Jugements », concernant celui qui construit sur sa propriété ce qui nuit à son voisin (hadith 2431) et par Ahmed dans son « Mousnad » (hadith 2921) par l’intermédiaire d’Ibn `Abbas رضي الله عنهما. En-Nawawi a dit à propos du hadith (numéro 32) cité dans « El-Arba`îne En-Nawawia » : « Ce hadith a d’autres chaînes de transmission dont l’une renforce l’autre ». Ibn Radjab a dit dans « Djâmi` El-`Ouloûm Wel-Hikam » (page : 378) : « Effectivement, le hadith est comme l’a jugé En-Nawawi ». En outre, ce hadith est jugé authentique par El-Albâni dans « El-Irwâ’ » (3/408).
([3]) Plante servant à teindre en jaune rougeâtre.
([4]) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre du « Pèlerinage », concernant le parfum qui est interdit pour l’homme et la femme qui sont en état de Ihrâm (sacralisation) (1/441) par l’intermédiaire d’Ibn `Omar رضي الله عنهما.
([5]) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre des « Funérailles », concernant le deuil que fait la femme à un autre que son mari (1/306) par Mouslim, chapitre du « Divorce » (2/692) (hadith 1486) par l’intermédiaire de Oum Habîbaرضي الله عنها. Et la raison pour laquelle le hadith a été rapporté est que Zayneb Bint Abi Salama a dit : j’étais rentrée chez Oum Habîba juste après la mort de son père Abou Soufyâne. Alors, Oum Habîba a demandé qu’on lui apporte un parfum mêlé d’une Soufra (couleur jaune). Elle en oignit l’une des servantes, ensuite passa ses mains sur ses joues et dit : « Par Allah, je n’ai aucune envie de faire du parfum, sauf que j’ai entendu le Prophète صلّى الله عليه وآله وسلّم étant en chaire dire… (puis elle cita le hadith)».
([6]) Rapporté par Abou Dâwoûd, chapitre de « L’arrangement des cheveux » concernant ce qui est rapporté à propos de la femme qui met du parfum pour sortir (4/258), par Et-Tirmidhi, chapitre de « La bienséance », concernant ce qui est rapporté à propos de la détestation que la femme sorte parfumée (hadith 2786) et par Ahmed (4/413) par l’intermédiaire d’Abou Moûssa El-Ach`ari رضي الله عنه. Ce hadith est jugé authentique par El-Albânidans « Sahîh El-Djâmi` » (hadith 323) et est jugé Hassane (bon) par El-Wâdi`i dans « Es-Sahîh El-Mousnad » (hadith 827).
([7]) Rapporté par Mouslim, chapitre de « La prière » (1/207) (hadith 443) par l’intermédiaire de Zayneb l’épouse de `Abd Allah Ibn Mess`oûdرضي الله عنه.
([8]) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre du « Mariage », concernant ce qu’on évite du malheur de la femme (3/10) et par Mouslim, chapitre « L’adoucissement des cœurs » (2/1256) (hadith 2740) par l’intermédiaire de Oussâma Ibn Zayd رضي الله عنهما.
([9]) Rapporté par Mouslim, chapitre de « L’adoucissement des cœurs » (2/1256) (hadith 2742) et par Ahmed (3/22) par l’intermédiaire d’Abou Saïd El-Khoudri رضي الله عنه.
([10]) Voir : « El-Fouroûq » d’El-Qarâfi (4/104) (cité de façon résumée).
([11]) Rapporté par Et-Tirmidhi, chapitre de « La description du Jour de la Résurrection, de l’adoucissement des cœurs et de la piété » (hadith 2518), par En-Nassâ’i, chapitre des « Boissons », concernant l’exhortation à laisser les suspicions (hadith 5711) et par Ahmed (4/267-270-441) par l’intermédiaire d’El-Hassane Ibn `Ali رضي الله عنهما. Ce hadith est jugé authentique par Ahmed Châkir dans sa « Recension de Mousnad Ahmed » (3/169), par El-Albâni dans « El-Irwâ’ » (1/44) et par El-Wâdi`i dans « Es-Sahîh El-Mousnad » (hadith 318).
([12]) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre de « La foi », concernant la faveur de celui qui cherche à préserver sa religion (1/19) et par Mouslim, chapitre « Le bail à complant et le métayage » (2/750) (hadith 1599) par l’intermédiaire d’En-Nou`mâne Ibn Bachîr رضي الله عنهما.