Sheikh Ferkous
Question : Quel est le jugement de regarder à la télévision les joueurs [tels que les footballeurs] qui découvrent leurs cuisses ? La cuisse est-elle considérée telle une partie qu’il faut couvrir ou non ?
Réponse : La Louange est à Allâh, Le Seigneur des mondes. Et que la prière et le salut soient sur celui qu’Allâh a envoyé en miséricorde pour l’univers, ainsi que sur sa famille, ses compagnons et ses frères jusqu’au Jour de la Rétribution. Cela dit :
Les savants ont divergé sur le sujet que la cuisse soit une partie à couvrir ou non en plusieurs avis, et chacun dispose de preuves attestées et authentiques, mais qui s’opposent les unes aux autres.
Par conséquent, concilier tous ces preuves est infaisable, et donner prépondérance à certaines par rapport à d’autres est inévitable. Et il ne t’échappe pas que les savants qui considèrent qu’une preuve issue de l’acte ne s’oppose point à celle qui est issue de la parole, tel qu’Ach-Chawkânî, ne procèdent pas à la prépondérance du fait qu’il n’y a pas d’opposition entre les preuves.
Car la prépondérance n’a lieu que quand une opposition survient. Quant à ceux qui ceux qui considèrent cela, n’ont pas de problème à concevoir que la cuisse est une partie que l’on doit couvrir, en mettant en œuvre les preuves oraux.
Et quand tu médites profondément sur ce sujet, tu trouveras, en plus de l’opposition entre les preuves, une opposition entre deux prépondérances : la première en considérant la chaîne narrative [des hadiths en question], et l’autre opposition est de considérer le Texte [du hadith] et le jugement ou sa signification.
En considérant la chaîne narrative, apparaît la preuve de ceux qui disent que la cuisse n’est pas une partie à couvrir, en s’appuyant sur le hadith rapporté par Al-Boukhârî d’après Anas ibn Mâlik رضي الله عنه que, le jour de Khaybar, le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم : «a relevé son pagne laissant voir sa cuisse au point que je regardais la blancheur de la cuisse du Prophète d’Allâh صلَّى الله عليه وسلَّم»(1) ; la chaîne narrative de ce hadith est plus authentique que celle du hadith de Djarhad rapporté par Mâlik et relaté sans mentionner sa chaîne narrative [mou‘allaq]par Al-Boukhârî dans son Sahîh : « Couvre tes cuisses, car la cuisse est une partie qu’il faut couvrir [‘awra] »(2), et le hadith qui est plus fort en chaîne narrative est plus approprié à être devancé.
Quant au fait de considérer le Texte [du hadith], les preuves de ceux qui disent que l’on doit couvrir la cuisse paraissent plus forts. Car ce sont des preuves oraux auxquels font face des preuves issues de la pratique, et « Le dire est prioritaire à l’acte », car l’acte est sujet à des probabilités comme la spécificité, l’inattention et la distraction contrairement au dire. Ainsi, une preuve qui n’est pas sujet à une probabilité est plus appropriée à être devancé vu sa force.
Aussi, les preuves de ceux qui adoptent que la cuisse est une partie qu’on doit couvrir apparaissent plus prioritaires par le fait de considérer le jugement ou la désignation. Car ces derniers sont prohibitifs, c’est-à-dire qu’ils expriment l’interdiction, tandis que les preuves de leurs opposants expriment la licéité, et on n’est pas sans savoir qu’« un Texte qui indique l’interdiction est devancé sur un autre qui indique la licéité ».
En effet, délaisser une chose licite est moins grave que de commettre un interdit.
En outre, il est possible d’évaluer les deux prépondérances qui s’opposent en concluant que le hadith d’Anas رضي الله عنه, même si sa chaîne narrative est plus authentique, sa signification est toutefois probable (hypothétique) vu les aspects suivants :
1- Il est probable qu’il soit sujet à la spécificité et à d’autres probabilités.
2- Son acte صَلَّى اللهُ عليه وآلِه وسَلَّم ne montre pas qu’il l’ait fait intentionnellement et exprès.
3- Il s’agit d’un événement propre à une situation et d’un fait spécifique qui n’implique aucune généralité.
4- Qu’il se soit passé avant que l’interdiction ne soit émise.
Ainsi, si ces aspects ne s’étaient pas confrontés à ce hadith, lui donner prépondérance aurait été plus fort et prioritaire. Quant au hadith de Djarhad, il est prépondérant par la considération qu’il est une Législation générale qui incombe de le mettre en pratique.
Cependant, l’établissement de l’interdiction [de découvrir] la cuisse provient du suivi du fondement [c’est-à-dire, qu’elle est une partie que l’on doit obligatoirement couvrir], car toute chose interdite a une périphérie, et la périphérie d’un interdit prend le statut de la chose interdite qu’elle entoure. Néanmoins, la périphérie est moins intense en interdiction que la chose interdite-même.
Ainsi, la partie des cuisses que l’on doit couvrir est moins grave que la partie des deux sexes. La première est une nudité légère (moukhaffafa), et la seconde est une nudité essentielle (moughalladha). C’est pourquoi il est interdit de se mélanger et de s’isoler avec une femme étrangère (qu’on peut épouser), car cela enferme une introduction au coït. Et l’interdiction du coït est plus ferme que ses débuts introducteurs.
De ce fait, leur interdiction est plus ferme puisqu’ils mènent à l’illicite. Tel un berger qui fait paître son troupeau autour des frontières interdites, il faillit de les faire paître à l’intérieur. Comme il a été également interdit d’acétifier le vin même s’il n’enivre pas, car cela aboutit à l’ivresse et incite à elle.
Aussi, il est interdit de regarder une cuisse du fait qu’elle est liée aux deux sexes. Cette interdiction émane à la périphérie qui les entoure comme quelqu’un qui serait sur le point de franchir les frontières de l’illicite. C’en est une protection pour ces frontières, une clôture préventive qui les entoure comme a dit le Prophète صَلَّى اللهُ عليه وآلِه وسَلَّم : « Certes chaque roi a un domaine réservé et certes le domaine réservé d’Allah est de Ses interdits. »(3)
Cela étant dit, la science parfaite est auprès d’Allâh تعالى. Et notre dernière invocation est : « Louange à Allâh, le Seigneur des mondes ». Et qu’Allâh prie sur notre Prophète Mouhammad, sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Rétribution, et qu’Il les salue.
Alger, le 5 de Djoumâdâ Al-Oûlâ 1417 H,
correspondant au 15 septembre 1996 G.
Source : Tiré du site de Sheikh Ferkous
(1) Rapporté par : Al-Boukhârî (371) et Mouslim (1365), d’après Anas رضي الله عنه.
(2) Rapporté par Al-Boukhârî en tant que hadith mou‘allaq, At-Tirmidhî (2795) et Mâlik, d’après la version d’Aboû Mous‘ab Az-Zouhrî Al-Madanî (2122). Al-Hâfidh (Ibn Hadjar) a dit dans [Al-Fath (1/478)] : « Son hadith est relié chez Mâlik dans Al-Mouwatta’ et At-Tirmidhî qui l’a jugé bon, Ibn Hibbân l’a jugé authentique et l’auteur [c’est-à-dire Al-Bukhârî] l’a jugé faible dans At-Târîkh à cause de l’opposition au niveau de sa chaîne narrative, et j’ai cité plusieurs de ses vois dans Taghlîq At-Ta`lîq. »
(3) Rapporté par : Al-Boukhârî (52) et Mouslim (1599), d’après An-Nou‘mân ibn Bachîr رضي الله عنهما.